Au Canada français, le Jour de l’an représentait l’apogée du temps des fêtes. C’était la fête de famille par excellence ; elle commençait traditionnellement par un moment solennel : l’aîné demandait la bénédiction à son père au nom de tous les enfants. Les enfants et l’épouse s’agenouillaient devant lui. Le père de famille disait un petit mot, faisait le signe de la croix en disant : « Que Dieu tout-puissant vous bénisse, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. » Et tous de répondre : « Amen. » On se relevait et on se souhaitait gaiement une bonne année et le paradis à la fin de ses jours.
Ce n’était qu’une fois ce geste accompli que la célébration du Premier de l’an commençait. Un repas substantiel attendait les convives : dinde, tourtière, ragoût de pattes de cochon, tranches de jambon, betteraves, beignes et gâteau aux fruits, etc. Puis, les familles s’offraient des étrennes. Tandis que les enfants étrennaient leurs nouvelles bébelles, les jeunes gens et les adultes dansaient gigues, cotillons et quadrilles au son du violon, sous les regards des vieux. Des mauvaises langues disent que, dans certaines familles, on s’arrosait le gosier de « caribou » ou de « baboche »…
Au Canada français, à l’époque, les cadeaux étaient échangés le Premier de l’an plutôt qu’à Noël, fête liturgique. Et c’était saint Nicolas qui distribuait des cadeaux aux enfants sages et non le Père Noël.
La veille du Jour de l’an, un cortège de jeunes gens se rendait dans les familles afin de recevoir des dons pour les paroissiens les plus pauvres : c’était la guignolée. Des produits de la ferme étaient offerts, et pour encourager les bénévoles à poursuivre leur quête dans le froid intense, l’hôte de la maison leur offrait un petit verre de rhum pour qu’ils se réchauffassent.
Luc Lewis. Sources : photo, Collection Colombe Martel. Société du patrimoine de Sainte-Brigide. Janvier 2019.