Il fut un temps, pas si lointain puisque certaines personnes qui ont franchi le cap de l’honorabilité, s’en souviennent encore, où l’annonce de la visite de l’inspecteur d’école venait jouer sur les nerfs des instituteurs et des institutrices. Certains d’entre eux et d’entre d’elles pouvaient en sentir les effets sous leur épiderme selon le principe de la somatisation… Quant aux élèves, ils étaient contaminés par la nervosité de leur instituteur ou institutrice. Les inspecteurs d’école avaient la réputation de chiens de garde des règlements du département de l’Instruction publique (ancêtre du ministère de l’Éducation). Certains inspecteurs avaient la réputation d’un pitbull, d’autres de chiens policiers à l’odorat raffiné, enfin, quelques-uns se partageaient la réputation d’un Saint-Bernard plus prompt à encourager les instituteurs et les institutrices qu’à les sermonner.
Toutefois, quelle que fût la réputation de ces derniers, les rapports qu’ils soumettaient au surintendant de l’Instruction publique et aux commissaires d’école donnaient une idée de l’objet de leur enquête comme de l’état des écoles et de l’enseignement de l’époque.
Dans une lettre du 21 octobre 1881, le surintendant, Gédéon Ouimet, rapporte les résultats de l’inspecteur Lamarche : « que les élèves de l’arrondissement no 6 n’ont pas tous les livres nécessaires; que vos écoles ne sont pas assez pourvues de cartes géographiques nécessaires et que l’on néglige d’enseigner la tenue des livres et le dessin ».
Le même surintendant, le 29 avril 1891, transmet aux commissaires d’école de Sainte-Brigide les remarques de l’inspecteur Demers : « que la maison d’école de l’arrondissement numéro 3 est à reconstruire; que le mobilier des écoles numéros 2 et 4 laisse à désirer; que les lieux d’aisance de l’école numéro 2 sont en mauvais état; qu’il est nécessaire de fournir un bon tableau noir à l’école numéro 4 et de réparer celui de l’école no 2; qu’il faut un registre pour les notes des visiteurs dans chacune des écoles qui n’en est pas pourvu; que vous avez engagé deux institutrices non diplômées sans n’avoir obtenu préalablement l’autorisation, ce qui vous expose, en vertu de la loi, à perdre la subvention du gouvernement ».
Le 8 février 1907, le surintendant, Boucher de LaBrière, informe les commissaires que « la maison d’école, dont la classe est dirigée par l’institutrice Alma Lessard, est excessivement froide et que les élèves souffrent grandement. »
Le même surintendant, le 13 novembre 1907, écrit aux commissaires que « l’école no 7 est en mauvais état; il faudrait la reconstruire ». Et il poursuit : « Les nos 4 et 8 ne sont pas acceptés (…) tous vos emplacements sont trop petits; la loi demande un demi-arpent en superficie .» Et encore : « Le mobilier des nos 7, 9 et 10 est défectueux; la loi exige que vous remplaciez les longues tables et bancs par des pupitres à deux places. Il faut des tableaux noirs partout. »
Le 9 mai 1898, James Reed, secrétaire-trésorier de Sainte-Brigide., reçoit une information du surintendant l’avisant « que leur école était en activité, avec une assistance moyenne de deux enfants ».
Les inspecteurs ne rapportent pas seulement des observations négatives, comme on peut le constater dans le texte suivant qui date de 1882 : « À l’école Modèle, M. Paradis continue de rapporter les mêmes succès que l’année précédente. L’ouvrage fait à cette école est considérable vu qu’il s’y trouve 3 classes de grammaire française, 2 de géographie, 6 d’arithmétique, outre les classes de lecture anglaise et française, de catéchisme, d’écriture, d’agriculture, de tenue de livres, de composition et de dessin. Les matières sont bien enseignées à l’école de M. L’école me parait bien tenue. À l’école no 3, l’anglais me parait faible. L’écriture et la géographie sont passables. La grammaire, l’histoire et l’arithmétique sont assez bonnes. Les élèves sont peu avancés à l’école no 4, mais comprennent bien ce qu’ils ont appris. L’école no 5 m’a paru assez bonne. L’examen de l’école no 6 a été satisfaisant. L’écriture, cependant, laisse un peu à désirer. Le manque d’assiduité fait que les progrès ne sont pas aussi rapides qu’ils devraient l’être. À l’école no 8, les élèves sont assez avancés et comprennent bien. En somme, les résultats obtenus dans toutes les écoles sont très satisfaisants. »
Luc Lewis. Sources : dossiers de la Commission scolaire de Sainte-Brigide. Archives de la municipalité. Septembre 2018.